Assemblée nationale : adoption du projet de loi "industrie verte", fin de la session extraordinaire

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par Léonard DERMARKARIAN, le Samedi 22 juillet 2023 à 14:15, mis à jour le Samedi 22 juillet 2023 à 14:35

Le projet de loi "relatif à l'industrie verte" a été adopté, en première lecture, par les députés par 217 voix pour et 75 contre, dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 juillet. Ce texte était le dernier à être inscrit à l'ordre du jour de la session extraordinaire de l'Assemblée nationale qui reprendra ses travaux législatifs après la pause estivale. 

Un dernier texte et puis s'en va. Au terme d'une première année de la législature pas comme les autres, notamment en raison de l'absence de majorité absolue, l'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, le projet de loi "relatif à l'industrie verte", par 217 voix pour et 75 contre, dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 juillet. Ce texte était le dernier à être inscrit à l'ordre du jour de la session extraordinaire de l'Assemblée qui a donc suspendu ses travaux législatifs, qui reprendront après la pause estivale.  

Le projet de loi "industrie verte" a été présenté par le gouvernement pour "faciliter, favoriser et financer" le développement d'une industrie décarbonée en France. Objectifs affichés d'ici à 2030 : réduire les émissions de gaz à effet de serre du troisième secteur d'activité le plus polluant en France, créer plus de 40 000 emplois industriels directs et renforcer la souveraineté industrielle du pays.

Simplifications administratives, épargne privée et planification

Dans la version issue de l'examen dans l'hémicycle, les principales dispositions du texte n'ont pas évolué par rapport à son examen par la commission spéciale qui avait été constituée à cet effet avec Guillaume Kasbarian (Renaissance) comme rapporteur général. La volonté de simplifier les procédures administratives et la consultation du public afin de diviser les délais par deux (articles 8 et 9) ont été maintenues, tout comme l'autorisation de dérogations au code de l'environnement si le projet industriel est jugé d'intérêt national (article 10).

La question du financement d'une industrie décarbonée est également au coeur des débats : mécanismes de verdissement de la commande publique, nouvel indicateur financier dit "indicateur climat" et création d'un "Plan d'épargne avenir climat" (PEAC, 1 milliard d'euros visé d'ici 2027) constituent les grandes mesures du texte. Enfin, le projet de loi comporte des mesures en matière de planification industrielle, notamment pour mieux exploiter les potentialités des friches dans le cadre des efforts de réindustrialisation - à cet égard, en séance publique, le gouvernement et la majorité sont parvenus à faire supprimer la création d'une commission régionale des friches qui avait été obtenue par les députés communistes en commission. 

Sans voir le texte être sensiblement modifié contre son gré, le gouvernement a cependant essuyé une défaite en matière de planification industrielle. Alors que celui-ci refusait depuis les débats en commission de définir précisément la notion d'industrie verte, un amendement porté par Emilie Bonnivard (Les Républicains) et amendé par différents groupes en séance, a été adopté pour définir une stratégie pluriannuelle jusqu'en 2030. Un amendement socialiste a aussi été adopté contre l'avis du gouvernement à l'article 1er afin d'inclure les objectifs de développement industriel dans les schémas d'aménagement régional. Au total, 94 amendements ont été adoptés en séance.

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"Un tournant dans l'histoire de notre économie"

Au terme de 31 heures de débats dans l'hémicycle, Bruno Le Maire a salué "un tournant dans l'histoire de notre économie". Le ministre de l’Économie s'est félicité de l'adoption d'un texte symbolisant la fin de "quarante années de délocalisations industrielles" et la fin du "dogme" de "l'industrie sans usines".

Un avis partagé par les groupes de la majorité (Renaissance, Démocrate, Horizons) qui ont apporté leur soutien au texte, à l'image notamment de Marie Lebec (Renaissance), affirmant que ce projet de loi "majeur", va "démontrer que la transition écologique constitue un levier de compétitivité et de développement".

"La montagne a accouché d'une souris"

Bien que le texte ait été jugé insuffisant par Alexandre Loubet (Rassemblement national) qui estime que "la montagne a accouché d'une souris", le groupe RN a néanmoins voté le projet du gouvernement (voir l'analyse du scrutin ici). Idem du côté Républicains, où Virginie Duby-Muller a loué un texte initial "plein de promesses", mais finalement "loin de l'IRA [Inflation Reduction Act, un texte législatif américain de soutien à l'industrie]", amenant son groupe à voter "pour sans enthousiasme".

Si certains groupes ont vu le verre à moitié plein, d'autres l'ont vu à moitié vide. Tout en reconnaissant les efforts du gouvernement sur la question industrielle, les députés Liot se sont abstenus, déplorant par la voix de de Benjamin Saint-Huile un texte "peu opérationnel". Même abstention du côté des députés socialistes et des communistes, Gérard Leseul (Socialistes) déplorant la "politique des petits pas" et Jean-Marc Tellier (Gauche démocrate et républicaine) critiquant, derrière la volonté de réindustrialiser le pays, un "faux vernis gaulliste" et une "relance libérale".

Enfin, députés de La France insoumise, ainsi que leurs collègues écologistes, ont voté contre. Alma Dufour (LFI) a vertement critiqué la politique industrielle du gouvernement, en dénonçant notamment l'insuffisance des fonds du PEAC (1 milliard d'euros d'ici 2027) par rapport à l'IRA (400 milliards de dollars investis par l’Etat américain). Même constat du côté de Charles Fournier (Ecologiste), qualifiant le texte de "rendez-vous raté" et critiquant, comme Alma Dufour, "les faux-amis de la biodiversité" que constituent à leurs yeux le Rassemblement national.

Après avoir été voté en première lecture par l'Assemblée nationale et le Sénat, le projet de loi fera l'objet, après la pause estivale, d'une commission mixte paritaire au cours de laquelle députés et sénateurs tenteront de trouver un accord sur le texte, ce qui ouvrirait la voie à son adoption définitive.