"Bien vieillir" : débats suspendus, le gouvernement promet la suite de l'examen "dans les meilleurs délais"

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par Soizic BONVARLET, le Jeudi 13 avril 2023 à 15:50, mis à jour le Vendredi 14 avril 2023 à 17:36

Plus long que prévu par l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, l'examen de la proposition de loi visant à "bâtir la société du bien vieillir" a été suspendu après la séance de nuit du jeudi 13 avril. Le ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, s'est engagé à ce que le texte soit réinscrit à l'ordre du jour du Palais-Bourbon "rapidement".

Une proposition de loi de la majorité visant à "bâtir la société du bien vieillir" comme première pierre d'un plan plus global, à venir, sur le "grand âge" ? Les députés de l'opposition étaient pour le moins réservés, et n'avaient pas hésité à le faire savoir à l'occasion de la discussion générale du texte, mardi 11 avril. Ses co-rapporteures, Laurence Cristol (Renaissance) et Annie Vidal (Renaissance), avaient pourtant tenté de désamorcer les critiques. "Cette proposition de loi n'est pas un projet de loi gouvernemental, et n'épuisera pas tous les sujets", avait notamment reconnu Laurence Cristol.

Parmi les dispositions qui ont eu le temps d'être examinées, et adoptées, par les députés, l'instauration d'une Conférence nationale de l’autonomie, qui définit des orientations prioritaires pour les actions mises en œuvre en faveur de la prévention de la perte d’autonomie et de l’habitat dit "inclusif", dans le cadre d’un plan pluriannuel.

Au-delà de l'isolement social des personnes vulnérables, que le texte se propose de contrer par une politique de l''"aller vers", Annie Vidal avait souligné parmi ses priorités "la promotion de la bien-traitance", au travers de la création d'une instance "dédiée au recueil, au traitement et au suivi des signalements", ainsi que le renforcement du droit à une vie privée et familiale, via un "droit inconditionnel" aux visites des proches de résidents en établissements pour seniors.

Le texte enrichi par plusieurs amendements de l'opposition

Alors que la proposition de loi laissait volontairement de côté les aspects de gouvernance et de financement, qui devraient être contenus dans un "plan d'action" plus large annoncé par le gouvernement, Jérôme Guedj (Socialistes) est parvenu à faire adopter un amendement prévoyant que d'ici au 1er septembre 2023, et cela tous les cinq ans, une loi de programmation pluriannuelle consacrée au grand âge détermine la trajectoire des finances publiques en matière d’autonomie des personnes âgées. Lors du vote, le gouvernement s'en est remis à la "sagesse" de l'Assemblée, disant "partager" le "souci de mieux programmer et donner plus de visibilité à l'ensemble des moyens".

Cette loi de programmation pour le grand âge devra définir "les objectifs de financement public nécessaire pour assurer le bien vieillir des personnes âgées à domicile et en établissement, et le recrutement des professionnels, ainsi que les moyens mis en œuvre par l’État pour atteindre ces objectifs". Suite à l'adoption de cette mesure, François Ruffin (La France insoumise), a notamment salué l'"héroïsme parlementaire" de son collègue socialiste et "'ses valeureux efforts' pour tenter de remplir le 'vide intersidéral' de la loi Bien Vieillir."

Autre mesure proposée par Jérôme Guedj, adoptée contre l'avis du gouvernement et de la commission, celle visant à assurer pour les résidents en EHPAD une liberté d'aller et venir, en particulier pour exercer leur droit à une vie affective et sexuelle. Une mesure contenue dans la proposition de loi que le député a lui-même déposé sur le bureau de l'Assemblée afin de "garantir le droit à vieillir dans la dignité et préparer la société au vieillissement".

Un amendement du groupe Démocrate a, en outre, été adopté afin de créer un comité d'éthique dans chaque EHPAD, chargé d'évaluer la mise en œuvre de la prévention et de la lutte contre les maltraitances, et du respect du droit des patients à une vie privée et familiale, en particulier aux visites des familles et proches des résidents.

L'actualité liée aux retraites en toile de fond des débats

La réforme des retraites n'a pas manqué de s'inviter dans les débats, plusieurs députés de la Nupes pointant notamment un paradoxe dans le fait de promouvoir une société du "bien vieillir", tout en reculant l'âge légal de départ à la retraite, risquant de réduire en raison de l'usure professionnelle, l'espérance de vie en bonne santé. "Vous voulez bâtir la société du bien vieillir en France, mais surtout pas avec une espérance de vie en bonne santé", a ainsi regretté Caroline Fiat (La France insoumise).

La séance ayant été levée à minuit, avant deux semaines de pause dans le travail législatif du Parlement, et sans que les députés n'aient pu aller au-delà de l'article 6 pour un texte qui en contient 14, le ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, s'est engagé au nom du gouvernement à ce que le texte soit réinscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée "pour pouvoir l'examiner dans les meilleurs délais, et avoir une loi rapide et attendue".