Protection des enfants : le projet de loi adopté

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Adrien Taquet vote PJL Enfance
par Soizic BONVARLET, le Vendredi 9 juillet 2021 à 10:10, mis à jour le Mardi 13 juillet 2021 à 08:41

Les députés ont adopté en première lecture, jeudi 8 juillet, le projet de loi relatif à la protection des enfants. Le gouvernement a fait valoir des apports en séance, le texte étant considéré comme trop peu ambitieux par les oppositions et certains acteurs associatifs ou institutionnels.

Répondre aux critiques. C'est avec cette volonté que le gouvernement a introduit deux nouveautés lors de l’examen en séance du projet de loi relatif à la protection des enfants, alors que l'examen en commission avait laissé paraître certaines insuffisances. En premier lieu, pour les enfants placés, le principe de non-séparation des frères et sœurs, sauf en cas de dysfonctionnement relationnel au sein de la fratrie. Une mesure saluée par tous les bancs de l’hémicycle, et adoptée à l’unanimité. Par ailleurs, un autre amendement gouvernemental a souhaité assurer, pour les jeunes qui sortent de l’aide sociale à l’enfance (ASE), un accès prioritaire aux bourses et hébergements étudiants, ainsi que la systématisation de la garantie jeunes. Pour ceux qui ne poursuivraient pas d’études, les départements devront être en mesure de proposer des contrats jeunes majeurs. Cette mesure, qui vise à mettre fin aux sorties sèches du dispositif de l’ASE, laissant trop souvent des jeunes livrés à eux-mêmes, a également été adoptée à l’unanimité.

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Hébergement hôtelier : interdiction ou institutionnalisation ?

L’une des mesures phare présente dès la rédaction initiale du projet du gouvernement était contenue dans l’article 3, gravant dans la loi l’interdiction de l’hébergement hôtelier pour des mineurs isolés. Mathilde Panot (La France insoumise), a relayé l’inquiétude de la Défenseure des droits quant aux exceptions prises par le texte, faisant valoir qu’il permettrait de "légaliser de fait, l’hébergement en hôtel pour les enfants placés à l’ASE pour deux mois", en prodiguant une base légale à cette pratique. La rapporteure Bénédicte Pételle a souligné que les mesures d’exception prévues pour des séjours de deux mois maximum avaient été prévues afin d’éviter de livrer des mineurs à la rue, et que la mention "à titre exceptionnel" était inscrite noir sur blanc dans la loi.

Le secrétaire d’Etat chargé de l’enfance et des familles a quant à lui défendu la mesure, arguant qu’il s’agissait avant tout d’"arrêter de mettre le sujet sous le tapis", tout en admettant qu’il n’avait jamais été question d’ "interdire purement et simplement". "Dès le mois de janvier j’ai dit qu’il ne fallait pas faire montre de dogmatisme en la matière", a-t-il ainsi poursuivi, "et qu’il fallait prévoir des exceptions que nous allions strictement encadrer".

C’est l’approche qui est la mienne depuis le début sur ce sujet-là, je la porte fièrement, nous devons être fiers de cet article 3. Adrien Taquet

Des amendements souhaitaient borner la limite temporelle de deux mois à un seuil nettement inférieur. Le gouvernement et la commission s’y sont opposés, au motif notamment que ce laps de temps permettait de couvrir la période d’évaluation de minorité pour les jeunes étrangers non accompagnés.

Un autre amendement, issu de la majorité et qui a en revanche recueilli l’aval du gouvernement et de la rapporteure, a été adopté afin d’interdire strictement et en toute circonstance le placement à l’hôtel d’enfants porteurs de handicaps.

Mineurs non accompagnés : les tests osseux restent de rigueur

Lors de l’examen de l’article 14 du texte, qui vise à instaurer une clé de répartition des mineurs non accompagnés plus "équitable" sur le territoire, les députés ont adopté un amendement permettant de mettre fin aux réévaluations abusives de minorité. En d’autres termes, un mineur qui a été déclaré comme tel suite à une évaluation effectuée dans un département, ne pourra pas être soumis à une deuxième évaluation sur demande d’un autre département.

La gauche de l’hémicycle, à l'instar d'Elsa Faucillon (Gauche démocrate et républicaine), a profité de l’examen de l’article pour tenter de mettre fin aux tests osseux infligés à ces jeunes pour établir leur minorité, méthode controversée à la fois sur un plan scientifique et éthique. Les amendements en ce sens ont tous été rejetés, à seulement quelques voix près.

Un amendement porté par Isabelle Santiago a par ailleurs été adopté contre l’avis du gouvernement et de la commission. Il permet au juge des affaires familiales de confier à la victime de violences conjugales, et à elle seule, l’exercice de l’autorité parentale pendant la durée d’une ordonnance de protection.

Enfin, des amendements issus de la majorité, dont l’un était porté par la rapporteure Bénédicte Pételle (La République en marche), permettent d’instaurer un droit de visite aux parlementaires dans les lieux d’accueil et d’hébergement des enfants confiés à l’ASE. Les amendements ont été adoptés, à l'issue d'un débat sur l’opportunité d’informer préalablement le conseil départemental – risquant, selon certains députés, de biaiser le processus – ainsi que sur la présence éventuelle de journalistes. Celle-ci n’a pas été prévue par les amendements votés, mais le gouvernement s’est en revanche engagé à lever le délai obligatoire de sept jours concernant l'information du département.

Le texte a été adopté dans la soirée à l’unanimité des votants, les groupes de La France Insoumise et de la Gauche démocrate et républicaine s’étant abstenus. Adrien Taquet est revenu sur les critiques concernant le supposé manque d’ambition du projet de loi, le qualifiant au contraire de "vrai texte de progrès", et se félicitant d’un travail législatif fructueux.

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